Bernard Debré est professeur de médecine avant d'être un homme politique. C'est aussi un humaniste qui se dessine au travers des pages de son dictionnaire amoureux qui, comme tous les tomes de cette collection éditée par Plon, peut se lire au choix article par article ou selon le désir, au hasard des sujets classés par ordre alphabétique, en se référant spontanément au thème choisi. Lorsque j'acquis l'ouvrage je pensai y trouver le détail de certaines pathologies ou bien encore des éléments me permettant d'y découvrir diagnostics et thérapeutiques. Si l'on y trouve quelques informations de ce type, ce n'est pas un annuaire ou une encyclopédie médicale. C'est autre chose où l'auteur nous livre le fond de sa pensée, mêlant à ses connaissances l'humour, la pertinence, la mythologie et enfin la religion, qui n'est que la continuité de son précédent.
Précisant dans son avant-propos que "la religion et la médecine ont dormi longtemps dans le même lit", chamans et plantes participant de guérisons aléatoires, la dichotomie se fit prégnante au fur et à mesure que progressait la science. On constate à le lire que même de nos jours, en ce début de XXI e siècle où la science est omniprésente, les peurs, les angoisses et les préjugés n'ont pas encore été bannis de l'esprit des hommes. Face à la maladie l'ignorance nous égare et fait rejeter, comme autrefois lépreux ou pestiférés, ceux atteints d'affections qui effrayent. Et la religion, quelle que soit la divinité pour laquelle elle impose ses croyances, n'est pas absente dans le refus caractériel du progrès.
De la plus simple protection permettant la non-transmission du sida à la pratique de l'avortement, de l'eugénisme à la mort assistée, de la recherche sur les cellules souches aux mères porteuses, les églises ou, pire, les sectes, refusent à priori toute avancée. Mais la science a toujours su franchir les obstacles et poursuivre, pour le bien de l'humanité, sa progression.
Nous ne partageons pas les mêmes opinions politiques, mais il en est une que je fais mienne lorsqu'il écrit que "...je rejette viscéralement: un système dans lequel les aspirations individuelles ne compteraient pour rien face à la norme collective, norme imposée aussi bien par une idéologie scientifique dominante que par un Etat dictatorial..."
Entre l'outrance, le fascisme des uns (tel ce meurtre, perpétré aujourd'hui, du  médecin américain, George Tiller, pratiquant l'IVG) et la tiédeur des autres, il est salutaire que des voix s'élèvent pour apporter un autre refrain, celui de l'humanisme. Bernard Debré fait partie de ces rares esprits. 

B.Debré - Dictionnaire amoureux de la médecine - Plon - 24€